Terre et environnement

Blob, vous avez dit blob?

Verre d'eau dans une assiette

Physarum polycephalum dans les sous-bois (Image: frankenstoen/Wikimedia commons, licence CC)

Il se reproduit par spores et vit dans les sous-bois pourtant ce n’est pas un champignon, il se déplace et résout des problèmes pourtant ce n’est pas un animal, il a l’apparence d’une mousse pourtant ce n’est pas un végétal. Mais qui est le blob? Cet unicellulaire géant aux propriétés hors du commun fascine les chercheurs du monde entier.

Tu as déjà certainement croisé son chemin dans les forêts, il ressemble à une grosse mousse jaunâtre qui prolifère lorsque le temps est humide. Son nom scientifique est Physarum polycephalum. C’est un myxomycète apparu sur Terre il y a environ un milliard d’années. Le blob est constitué d’une cellule géante qui comporte plusieurs noyaux dont la taille peut atteindre plusieurs mètres carrés. Dans la nature, il se nourrit de bactéries et de champignons. Pour se déplacer il déploie des veines appelées pseudopodes dans lesquelles le mouvement de va et vient du cytoplasme lui fait atteindre des vitesses allant de 1 à 4 centimètres par heure.

Rien n’arrête le blob

Le blob tire son surnom du film de science-fiction The Blob (1958) dans lequel une masse gélatineuse à la croissance exponentielle colonise la planète en avalant tout sur son passage. Pas d’inquiétude, Physarum polycephalum n’est pas un envahisseur menaçant, il est absolument inoffensif. Cependant, il partage certaines propriétés avec son homonyme cinématographique. Par exemple  Physarum polycephalum a une croissance exponentielle: il peut doubler de taille tous les deux jours. Par ailleurs, le blob est pratiquement immortel. Lorsque les conditions environnementales lui sont défavorables il entame un processus d’assèchement et se maintient en état de dormance sous la forme d’un sclérote. Cet état de dormance peut durer plusieurs années avant que les paramètres d’humidité et de disponibilité des nutriments soient à nouveau réunis pour que le blob reprenne sa croissance exponentielle. Le blob détient également le record dans la catégorie cicatrisation. Si on le découpe en morceaux, il se régénère en seulement deux minutes et forme plusieurs blobs clonaux.

Sans cerveau il apprend et enseigne

Cet organisme extrêmement simple et dépourvu de système nerveux est néanmoins doté de capacités d’apprentissage étonnantes. Pour l’illustrer des chercheurs ont développé une expérience dans laquelle une substance répulsive et inoffensive, la quinine, est placée entre un blob et sa source de nourriture. D’abord le blob est réticent. Puis en quelques jours il intègre qu’il est possible d’accéder à la nourriture en traversant la quinine sans se mettre en danger. Ce procédé d’apprentissage s’appelle l’habituation et c’est la première fois qu’on l’observe chez un organisme unicellulaire. Il nécessite une forme de mémoire. Le blob en effet, tire des leçons de ses expériences et adapte son comportement à son environnement. De plus, il a été démontré que les blobs ayant appris par habituation à surmonter un obstacle peuvent transmettre leurs informations à des blobs naïfs, les rendant à même de surmonter ledit obstacle sans l’avoir jamais rencontré. Le blob est aussi capable de résoudre des problèmes complexes, il sait trouver le chemin le plus court entre plusieurs sources de nourriture séparées par des obstacles. Ainsi, des chercheurs ont voulu comparer la capacité du blob à optimiser son réseau veineux avec notre capacité à optimiser des voies de communication. En plaçant un blob sur la reconstitution d’une carte de la région de Tokyo - sur laquelle chaque ville est matérialisée par un flocon d’avoine - le blob développe un réseau veineux plus efficace que le réseau de chemin de fer actuel de la région de Tokyo!

Ci-dessus, la vidéo de la classe du gymnase Bäumlihof (BS) lauréate du concours Science on the move 2017. Les élèves ont étudié le comportement du blob dans un labyrinthe.

Spore d'un blob

Spore de Physarum polycephalum (Image: sciencepics/CanStockPhoto)

Un système reproductif optimal

La reproduction du blob est étonnante. Chez l’homme il y a deux compositions génétiques qui définissent le sexe: XX (femme) ou XY (homme). Le blob n’est ni mâle ni femelle, il se reproduit par spores et peut avoir 720 types sexuels. Les spores germent et libèrent des cellules amiboïdes qui ont 719 chances sur 720 d’être de sexe «opposé» et de pouvoir fusionner pour former un nouvel individu quand elles se rencontrent.

Une source d’inspiration pour les chercheurs

Notre corps compte 100’000 milliards de cellules qui coopèrent pour assurer la survie dans notre environnement. Certaines sont spécialisées dans l’apprentissage ou la communication, d’autres dans la reproduction, d’autres encore dans la digestion. Physarum polycephalum est capable d’assurer toutes ces fonctions en une seule cellule. Il constitue ainsi un modèle d’étude très intéressant pour les chercheurs. Le réseau veineux de Physarum polycephalum a été étudié pour développer des algorithmes capables d’optimiser nos réseaux de télécommunication. Le blob pourrait aussi avoir des applications en médecine humaine. Il produit par exemple un petit polymère qui peut être utilisé dans le transport ciblé de médicaments et participer à l’optimisation des chimiothérapies actuelles.

Longtemps méconnu du grand public, le blob a pris sa revanche. Il fascine par ses propriétés inédites et suscite un intérêt grandissant. Un ouvrage entier lui est déjà consacré et des kits de culture sont désormais vente libre.

Dans la rubrique faits divers: 1973 Texas, une femme découvre dans son jardin une énorme masse jaune qui ressemble à une éponge. La femme effrayée appelle les policiers qui interviennent et tentent de découper, de brûler puis de tirer sur la masse en question. Le lendemain, stupéfaite, la propriétaire découvre que non seulement la masse est toujours bien implantée dans son jardin mais qu’elle a également doublé de taille! Certains ont d’abord pensé qu’il s’agissait d’un organisme extraterrestre mais les scientifiques ont rapidement découvert qu’il s’agissait d’un blob gigantesque.

Une autre vidéo du concours Science on the Move 2017.

Texte: Rédaction SimplyScience.ch

Sources:
Habituation in non-neural organisms: Evidence from slime moulds. Boisseau R.P et al. Proceedings of the Royal Society B. 2016.   
Brainless but Multi-Headed: Decision Making by the Acellular Slime Mould Physarum polycephalum. Beekman M. & Latty T. Journal of molecular biology. 2015.   
Le blob, cet étrange génie visqueux, ni plante, ni animal, ni champignon, Nathaniel Herzberg, Le monde.fr/sciences.   
Communiqué de presse du CNRS du 27 avril 2016.   

Créé: 31.07.2013

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