Terre et environnement

Le castor - architecte paysagiste non diplômé

Castor

En rongeant, coupant et amassant du bois, le castor façonne le paysage. (Image: le_cyclope/CanStockPhoto)

Le castor est de retour en Suisse depuis peu, mais il a déjà modifié et marqué le paysage plus que tout autre animal. Sa présence crée des paysages enchantés et une grande biodiversité, mais peut aussi être une source de conflits.

Castor, qui es-tu?

Le castor européen (Castor fiber) est le plus gros rongeur d'Europe avec une longueur pouvant aller jusqu'à 135 cm (avec la queue). Les castors sont généralement monogames, c'est-à-dire que le mâle et la femelle passent toute leur vie ensemble. Les castors sont semi-aquatiques, ils passent une partie de leur temps dans l'eau, mais habitent les zones riveraines. La connaissance de ce mode de vie est essentielle pour comprendre comment le castor peut influencer le paysage.

Le castor en Suisse - hier et aujourd'hui

Tronc d'arbre rongé par des castors

Tronc d'arbre rongé par des castors. (Image: Philip Taxböck, Hallo Biber!)

Jusqu'au 19e siècle, le castor était largement répandu en Suisse. Des cours d'eau lents et des rives non aménagées, faciles à creuser: les nombreux lacs et rivières de Suisse offraient un habitat adapté pour ces animaux. La chasse au castor pour sa précieuse fourrure, sa chair soi-disant savoureuse et le castoréum (voir l’encadré plus bas), a cependant mené à sa disparition de Suisse. Grâce à des mesures de réintroduction (transferts d’animaux, renaturation de rivières et de zones alluviales) pendant la seconde moitié du 20e siècle, la population de ce rongeur est passée chez nous de 140 animaux réintroduits initialement à près de trois mille. Depuis, les rives de toutes les grandes rivières font de nouveau partie de son habitat. Bien que la réintroduction du castor soit encouragée dans notre pays, que ces animaux soit protégés par la loi suisse sur la chasse et que leur chasse ainsi que la destruction de leurs barrages et constructions soient interdites, la cohabitation entre le castor et l'être humain n'est pas sans poser de problèmes.

 

Comment le castor bâtit sa maison

Le castor façonne le paysage dans lequel il vit comme nulle autre espèce. Avec ses barrages impressionnants, il obstrue des cours d'eau et transforme ainsi des rivières et les zones adjacentes en lacs artificiels. Il creuse aussi des terriers dans les talus de la berge et abat les arbres dont il a besoin pour ses constructions.

Barrage de castor

Barrage de castor près de Marthalen (ZH). Une famille de castors vit dans cette région depuis 2008. Elle a construit un barrage sur le ruisseau Mederbach, inondant ainsi la forêt. (Image: Philip Taxböck, Hallo Biber!)

Le travail imposant du castor ne fait pas que des heureux. Les dommages causés par l'activité du castor touchent surtout la foresterie et l’agriculture: arbres abattus, eau stagnante dans les plantations forestières et les champs et destruction d'ouvrages de protection contre les crues n'en sont que quelques exemples. Le plus grand lac de castor de Suisse se trouve à Marthalen dans le canton de Zurich, où ces animaux ont modifié le paysage de façon impressionnante en inondant une grande surface de forêt (3.8 hectares) par un barrage sur un petit ruisseau. Des propriétés privées ou des installations sportives proches de l'eau peuvent aussi être touchées.

De critically endangered à vulnerable

Malgré ces conflits, la protection du castor en Suisse est incontestée. Sa population y est encore faible et sa survie à long terme n’est pas assurée. Le castor est encore classé comme critically endangered sur la liste rouge, c'est-à-dire qu'il est toujours considéré comme espèce en danger critique d'extinction. Cette liste date de 1994, alors que la population de castors était encore nettement plus faible. Les progrès accomplis ces dernières années en matière de protection du castor pourraient permettre de le classer comme espèce vulnérable sur la prochaine édition de la liste rouge. En tous cas, son statut d'espèce prioritaire au niveau national bénéficie au castor dans sa lutte pour la survie. Le castor bénéficie d'une protection supplémentaire car ses activités de barrage, d'abattage et de creusement ont un impact positif sur la biodiversité.

Castor et biodiversité

La grenouille verte, la rousserolle effarvate et le caloptéryx éclatant ne sont que quelques-unes des espèces animales qui dépendent directement de la présence du castor. En transformant le paysage, le castor permet à de nouveaux biotopes de voir le jour; les modifications de l'habitat créent des niches pour des espèces qui ne pouvaient pas s’y installer dans les conditions précédentes. Les mêmes processus entraînent aussi une augmentation de la diversité des espèces végétales d'un paysage. La reine des prés et le ciste maraîcher par exemple font partie des espèces qui s'épanouissent sur les prairies humides des castors.

Le castor, une réintroduction réussie?

Paysage de Marthalen façonné par les castors

Les zones alluviales entourant le lac de castors à Marthalen sont maintenant classées en réserve naturelle. (Image: Philip Taxböck, Hallo Biber!)

D’importants efforts sont entrepris pour favoriser la survie du castor en Suisse. Ainsi le «Service conseil castor» de Neuchâtel coordonne depuis 1996 les connaissances sur les populations locales de castor, la Confédération encourage les propriétaires forestiers et les agriculteurs à prendre des mesures préventives pour éviter les conflits et les dégâts et, outre le WWF et Pro Natura, diverses organisations de protection de la nature et associations régionales se soucient du bien-être de ce grand rongeur. Une exposition sur le castor au musée de la nature, des excursions dans les paysages façonnés par le castor, la création de sentiers pédagogiques dédiés au castor ou la renaturation de rivières et la revalorisation de berges sont quelques exemples des efforts entrepris par l'homme dans ce contexte. Le castor bénéficie en outre du fait que ses ennemis naturels, lynx, loup et ours brun, ont disparu ou ne sont présents qu'en petit nombre jusqu’ici. Les chances sont donc bonnes pour que les nouvelles concernant le castor continuent d’être positives et que le succès de sa réintroduction fasse du castor un habitant et architecte de nos paysages, sur lequel il faudra compter à long terme. Les arbres abattus ou les champs inondés ne sont-ils pas un faible prix à payer pour ces forêts riveraines impressionnantes et ces paysages enchanteurs que nous devons au castor?

Le castoréum, qu'est-ce que c'est ?

Le castoréum est une sécrétion avec laquelle le castor marque son territoire et entretient sa fourrure. C'était l’une des principales raisons de la chasse au castor. Jusqu'au 19e siècle, des propriétés médicinales étaient attribuées au castoréum. Il était employé entre autre contre l'épilepsie, les crises d'hystérie et les convulsions. Dans la médecine actuelle, cette substance n'est plus utilisée qu'en homéopathie. Toutefois, l'ajout de castoréum dans les aliments est autorisé aux USA. Il est utilisé comme «arôme naturel» pour le goût de framboise, de vanille ou de fraise. Une boisson alcoolisée norvégienne est aussi aromatisée au castoréum. Il existe en outre des parfums qui contiennent du castoréum, vraisemblablement pour bénéficier de son effet prétendument érotique.

Créé: 06.07.2017

Cet article a été automatiquement importé de notre ancien site. Merci de nous signaler, à redaction(at)simplyscience.ch, toute erreur d'affichage.

Plus