Primaire

Un festival de sciences organisé par une enseignante et ses élèves

Festi'Sciences 2018 Neuchâtel

Un public familial est venu à cette première édition de Festi'Sciences à Neuchâtel le 19 mai 2018. (Image: Nour Hammani)

Nathalie Grossenbacher est enseignante au Collège du Crêt-du-Chêne à Neuchâtel. Elle a organisé le 19 mai 2018 un festival de sciences pendant lequel des élèves de 8P ont présenté des expériences sur le thème de l’énergie aux visiteurs. L’enseignante souligne l’aspect positif de la démarche pour les élèves: le fait de devoir transmettre leurs connaissances les a stimulés dans leur apprentissage. Dans cette interview, elle nous raconte aussi la genèse du projet, qui pourrait inspirer d’autres enseignants à se lancer dans leur propre école.

Comment avez-vous eu l’idée d’organiser cet événement?

Suite à la venue dans la classe d’une médiatrice scientifique du Service de promotion des sciences de l’EPFL, les élèves souhaitaient réaliser une sortie en fin d’année. On s’est imaginés organiser un festival en faisant des démonstrations de différentes expériences, aussi parce qu’ils avaient eu du plaisir à réaliser celles proposées par l’EPFL autour du thème de l’énergie. En 8e année (8P Harmos), une grande partie du temps est dédié à ce thème et il permet de réaliser une large palette d’expériences.

Comment avez-vous décidé des activités? Selon le plan d’études?

Non, j’ai beaucoup discuté autour de moi avec des personnes ayant des professions plus scientifiques ou techniques. J’ai aussi fait des recherches dans des bouquins et sur internet, je leur ai montré ce que j’avais trouvé. Mon père m’a beaucoup aidée pour la conception des expériences, il a de la facilité avec la technique et l’électricité comme il est électricien. Le Service de promotion des sciences de l’EPFL nous a aussi prêté des modules développés pour une manifestation sur le thème de l’énergie. Au final, les expériences que nous avons présentées n’étaient pas directement reliées au plan d’études, mais les élèves ont pu expérimenter la démarche scientifique, qui est un objectif du plan d’études romand.

Une élève en pleine démonstration

Du courant à partir de citrons, un grand classique présenté par cette élève (Image: Nour Hammani)

Quelle classe a participé et comment avez-vous travaillé?

C’était une classe de 8e année que je voyais deux périodes par semaine pour les sciences, donc relativement peu. J’enseignais dans d’autres classes en tant que généraliste et donc on a principalement travaillé en dehors des heures d’école. Ça a permis de travailler séparément avec les groupes sur leurs expériences et leurs thématiques précises. Avec le recul, je pense que cela aurait été plus facile et peut-être plus efficace de voir tous les élèves en même temps. Certains élèves ont aussi aidé à faire d’autres choses, comme participer à une émission de la RTN, créer des affiches ou imaginer la décoration. J’ai dû réaliser des panneaux plus théoriques qui étaient affichés dans les corridors et cela m’a pris du temps parce que je n’ai pas de formation scientifique. J’ai aussi bénéficié des conseils de l’Institut de physique de l’Université de Neuchâtel et de l’aide de quelques doctorants pour les thématiques que j’avais de la peine à vulgariser.

Avez-vous eu du soutien en terme de matériel, pour la logistique ou autre?

L’EPFL m’a prêté du matériel, sinon j’ai acheté ou récupéré certaines choses. J’ai reçu un petit peu d’argent du projet Bepog au Jura, qui fait la promotion des métiers techniques et qui a soutenu le festival dans l’idée que peut-être il devienne itinérant, que d’autres enseignants s’y intéressent et qu’on puisse peut-être collaborer. Et puis j’ai reçu un petit peu d’argent de l’école pour payer les affiches et un peu de matériel. Mais voilà, ce n’était pas des grandes sommes, donc il a fallu se débrouiller pour faire des choses simples.

Deux élèves prêts à répondre aux questions des visiteurs

Deux élèves prêts à répondre aux questions des visiteurs (Image: Nour Hammani)

Comment avez-vous impliqué les élèves, qu’est-ce qu’ils ont fait, étaient-ils enthousiastes?

Alors oui, ils étaient très enthousiastes, rien qu’à l’idée de devoir présenter leurs expériences face à un public et que des gens de l’extérieur allaient venir les écouter. Le fait que c’était un festival et que les médias locaux en aient parlé a aussi motivé les troupes. Les élèves ont beaucoup appris, parce qu’ils savaient que ce qu’ils apprenaient ils allaient pouvoir le transmettre. C’est aussi l’élément central de cette démarche: quand il y a un véritable projet derrière, l’apprentissage prend du sens et c’est sans doute plus facile pour l’élève de trouver une motivation et aussi d’ancrer ce qu’il apprend plus durablement. Les élèves de la 8e année ont tenu eux-mêmes leur stand pendant la soirée et j’ai trouvé qu’ils ont expliqué les expériences avec beaucoup de persévérance. Au fil de la soirée, ils ont pris confiance en eux, leurs paroles et leur attitude sont devenues de plus en plus spontanées et interactive. Au moment du bilan, plusieurs élèves ont dit que c’était difficile de devoir s’adapter à des enfants jeunes comme à des adultes plus âgés, parfois aussi avec certaines connaissances scientifiques préalables.

Gants et lunettes de protection pour cette expérience

À Festi'Sciences, ce sont les élèves qui font les démonstrations scientifiques! Avec l'équipement de protection nécessaire et sous la surveillance discrète d'un adulte (Image: Nour Hammani)

Et les parents d’élèves? Et les autres enseignants?

Une collègue enseignante et des parents sont venus donner un coup de main pendant la soirée, notamment à la cantine. Et puis, des étudiants de la HEP et deux étudiants de l’EPFL sont venus et ont joué le rôle de coaches pour les différents groupes d’élèves. Ils étaient là au besoin pour les aider mais petit à petit les élèves ont eu assez confiance et étaient suffisamment au clair pour être autonomes. Pour les élèves c’était assez valorisant d’avoir des adultes qui étaient avec eux et qui observaient ce qu’ils faisaient. Pour certaines expériences un petit peu plus «dangereuses» ou «délicates», comme la machine à vapeur, c’était bien qu’un adulte soit présent pour la sécurité.

Quel bilan en retirez-vous?

Ça a été extrêmement bénéfique pour les élèves, je pense qu’ils s’en souviendront longtemps. Ils sont sans doute allés plus loin dans l’apprentissage que ce qu’ils auraient fait en classe. Ils ont clairement développé leur autonomie et une belle démarche scientifique. Ils se sont rendus compte qu’ils avaient des compétences et que ce qu’ils apprenaient à l’école avait du sens. Je me suis rendue compte en écoutant les commentaires du public que l’on pouvait comprendre certains phénomènes ou même juste avoir du plaisir à observer certaines expériences sans forcément tout comprendre, et que du coup les sciences devenaient accessibles. Et puis dernière chose, je dirais que ça a permis d’ouvrir l’école à l’extérieur, ce qui je trouve est extrêmement important. Ce serait bien si on pouvait faire en sorte que des gens de métiers différents interviennent dans les classes et montrent aux élèves qu’il y a une autre vie que le milieu scolaire. De plus, ce genre de manifestation montre une image positive de l’école aux gens qui viennent de l’extérieur.

Est-ce que vous auriez envie de recommencer?

Oui, ça me tenterait bien, en apportant quelques modifications dans l’organisation pour que ce soit moins énergivore. J’aimerais bien travailler en équipe parce qu’on est forcément meilleur quand on se confronte aux idées des autres et quand chacun peut échanger sur différentes questions. D’ailleurs un groupe de travail est né avec des représentants de l’Université de Neuchâtel (Institut de physique), de Microcity et avec un enseignant d’une école secondaire. Un futur projet du même ordre que la première édition est prévu en 2019. La formule n’est pas encore établie, mais le concept restera le même: ce seront les élèves qui seront au centre! Une telle collaboration permettra de valoriser les forces de chacun et peut-être des personnes pourraient venir en classe pour donner certaines explications ou vulgariser d’une manière à laquelle je n’aurais pas forcément pensé. Et au final, cet événement pourrait peut-être prendre un peu plus d’ampleur et gagner en popularité.

 

Texte: Nathalie Grossenbacher et Rédaction SimplyScience.ch

Créé: 11.09.2015
Plus