Animaux et plantes

Le langage des plantes

Dolchwespe auf einer Orchideenblüte

La fleur de l’Ophrys miroir imite, par son aspect et son odeur, la femelle d’une scoliidae (Dasyscolia ciliata). Image : Pietro Niolu/Wikipedia Commons, CC BY-SA 3.0

Les plantes n’ont ni bouche ni oreilles et semblent mal équipées pour envoyer et recevoir des informations. Elles ont néanmoins développé une multitude de méthodes fascinantes pour échanger avec d’autres êtres vivants. Elles communiquent par des signaux optiques et chimiques ou avec l’aide de champignons et peuvent même transmettre des informations à leur descendance.

Les plantes ne peuvent pas parler, mais elles émettent des bruits ! On entend craquer à l’intérieur des troncs d’arbres en cas de grande sécheresse, car l’air interrompt le flux de sève. D’autres plantes émettent aussi des sons dans la bande des ultrasons, même s’ils ne sont pas audibles pour nous. À l’inverse, on a trouvé des indices suggérant que certaines plantes peuvent percevoir des sons et des vibrations et y réagir. Une étude a révélé que des racines de maïs non seulement émettaient des sons en croissant, mais qu’elles poussaient aussi en direction de sons émis par d’autres plantes. D’autres expériences ont montré que les fleurs libèrent plus de pollen lorsqu’elles « entendent » le bourdonnement des abeilles ou que les racines de pois poussent en direction du clapotis de l’eau. Même si la plupart des sons émis par les plantes sont plutôt aléatoires, ils nous réservent peut-être encore des surprises, car la communication acoustique des plantes a été peu étudiée jusqu’à maintenant.

Ein Blütenstand mit kleinen, weissen, fünfzähligen Blüten

Les fleurs de la saponaire officinale (Saponaria officinalis) sentent particulièrement fort le soir et la nuit et sont alors visitées par les papillons de nuit. Image : MurielBendel/Wikimedia Commons, CC BY-SA 4.0

Diversité de couleurs et de formes

Il est bien documenté que les plantes envoient des signaux aux animaux par leurs formes et leurs couleurs. Les fleurs, en particulier, attirent ainsi les pollinisateurs. En général, la stratégie des plantes à fleurs est d’attirer seulement certaines espèces. Elles peuvent ainsi s’assurer que les pollinisateurs vont très probablement transporter le pollen sur une plante de la même espèce et donc la féconder. Les fleurs violettes ou bleues attirent un nombre particulièrement élevé d’abeilles, car celles-ci perçoivent très bien les couleurs dans cette partie du spectre optique. Les fleurs blanches en revanche sont plus visibles la nuit et attirent les papillons de nuit. La fleur de l’Ophrys miroir est particulièrement astucieuse : Elle reproduit l’aspect et l’odeur des scoliidées femelles et attirent ainsi les mâles pour un prétendu accouplement. Va dans une prairie fleurie multicolore et observe quels insectes visitent quelles fleurs !

Le langage de la chimie

Alors que les animaux voient, entendent, sentent et émettent des sons, les plantes envoient et reçoivent des signaux souvent au moyen de composés organiques. Le plus souvent, il s’agit d’informations destinées à les protéger, elles ou leurs congénères, ou à permettre leur reproduction. Dans le sol, les poils fins des racines des plantes peuvent par exemple reconnaître les signaux chimiques d'autres plantes. Les racines de certaines plantes cessent de croître dans la direction de leurs congénères. Les composés organiques volatils (COV), également appelés hormones végétales, constituent un moyen de communication particulièrement important. Ils sont produits par la plante et s’échappent ensuite sous forme de gaz dans l’air, où ils sont transportés vers d’autres êtres vivants. Dans des conditions normales, les plantes libèrent déjà des dizaines de ces COV. En situation de stress, par exemple quand elles sont menacées par la sécheresse ou des prédateurs, c’est beaucoup plus encore. Rien que lors d’une promenade en forêt, nous inhalons des centaines d’hormones végétales différentes, mais nous humains n’en percevons que quelques unes comme odeur. C'est notamment le cas des terpénoïdes, qui sont responsables de l'odeur typique des résineux. Elles servent probablement de défense contre les prédateurs et peuvent même avoir un effet positif sur notre santé. L’odeur typique de terre ne vient d’ailleurs pas des plantes, mais de bactéries, les streptomycètes, qui libèrent le composé géosmine. Il est probable qu'elles fassent ainsi fuir les animaux qui mangeraient leur nourriture.

Raupe eines Maiszünslers auf Maisblatt

Si le maïs est mangé par une chenille, il peut attirer les prédateurs de la chenille avec des substances odorantes. Image: Keith Weller/Wikimedia Commons

Attirer des amis

Les fleurs dégagent des parfums pour attirer les pollinisateurs, même à de grandes distances, ce qui complète l’effet des couleurs et des formes. Alors que de nombreuses fleurs diffusent un doux parfum, certaines sentent très mauvais, comme l’arum titan, qui sent la charogne. Il attire ainsi des mouches ou des coléoptères qui se nourrissent d’animaux morts. Tu peux découvrir toi-même les nombreuses odeurs de fleurs, par exemple dans un jardin botanique. Y trouveras-tu aussi des fleurs à l'odeur désagréable ?

Avec leurs substances odorantes, les plantes attirent non seulement les pollinisateurs, mais aussi les prédateurs de leurs prédateurs. Les plantes réagissent à la salive de phytophages qui pénètre dans leurs feuilles grignotées en produisant certains COV. Par exemple, les haricots, le tabac ou le maïs remarquent s’ils sont mangés par des chenilles et produisent alors des substances qui attirent des insectes prédateurs, lesquels combattent ensuite les chenilles. Parmi ces insectes utiles, on peut citer les ichneumons qui pondent leurs œufs dans les larves des ravageurs. Les larves écloses des ichneumons mangent ces larves de l’intérieur.

Ethylène polyvalent

Un des COV végétal les plus connus est l’éthylène, un composé organique simple, dont la formule est C2H4. Il est produit par de nombreuses plantes à des fins diverses. En général, l’éthylène inhibe ou favorise la formation de certaines enzymes dans les plantes. L’éthylène joue un rôle important en tant qu’hormone de croissance dans le développement de parties de la plante telles que les fleurs ou lors de la mort des cellules, par exemple avant la chute des feuilles. Il provoque aussi la maturation des fruits, au cours de laquelle, par exemple, l’amidon est transformé en sucre. Les fruits tendres et sucrés sont particulièrement attrayants pour les animaux qui les mangent et excrètent les graines non digérées, et les disséminent ainsi. L’éthylène est en outre produit en plus grande quantité quand la plante souffre de stress.

Expérience de maturation avec l’éthylène

On peut étudier facilement un effet de l’hormone végétale éthylène à la maison. Pour l’expérience il faut deux pommes mûres et deux bananes vertes. En effet, les pommes mûres produisent de l'éthylène, qui accélère également la maturation d'autres fruits.

  1. Mettre une pomme et une banane dans un sac en plastique et le fermer. Le sac doit être gonflé car la maturation nécessite de l’oxygène.
  2. Conserver l’autre pomme et l’autre banane séparément et à l’air libre.
  3. Observer quelle banane mûrit le plus vite !
Apfel und Banane auf Holztisch

Le réseau dans le sol

Outre la communication par voie aérienne à l’aide de nombreuses hormones végétales volatiles, il se passe aussi des choses étonnantes, cachées à nos yeux, dans le sol. Un immense réseau de racines et de filaments de champignons (mycélium) s’étend dans la terre, surtout en forêt. Des arbres et d’autres plantes vivent en symbiose avec les champignons, c’est-à-dire qu’ils s’aident mutuellement. Les champignons rendent les aliments difficilement disponibles dans le sol accessibles pour la plante, qui en retour produit dans ses feuilles des composés organiques qu’elle met à disposition des champignons comme nourriture via ses racines. Ce réseau relie même des plantes entre elles, qui échangent ainsi des informations et peuvent par exemple s’alerter de la présence de prédateurs, comme avec les COV. Ainsi, les haricots peuvent avertir leurs congénères s’ils sont attaqués par des pucerons, via le réseau de racines et de filaments de champignons, afin que les haricots sains puissent produire aussi les substances de défense correspondantes.

Créé: 21.02.2022
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